Garden on an island
Reinis Hofmanis
Du 31 Octobre au 22 Novembre 2025

Jardin sur l’île

Au cœur même de Riga, il existe un lieu curieux – une idylle pour les passionnés de jardinage. L’île de Lucavsala s’étend entre les rives de la rivière Daugava, littéralement au milieu de la ville. Elle est composée de petites parcelles de jardin, dont le potentiel reste encore largement inexploré. Presque tout ce qui se passe à Lucavsala relève de l’initiative personnelle et du fait main. Pendant des décennies, elle a été habitée principalement par des personnes âgées, servant à la fois de source importante de nourriture et, pour certains, de lieu de vie. Ces dernières années, cependant, elle a vu arriver un nouveau public – des jeunes, des familles et des couples – venus y chercher un rythme plus lent et une connexion avec la nature.

Lucavsala est une révélation en ce sens – à la recherche de nature, il suffit de traverser le pont depuis le centre-ville pour entrer dans un espace en fleurs, relativement isolé, un lieu oublié de la ville et de ses autorités, resté presque inchangé depuis des décennies. Aujourd’hui, ce fragile écosystème fait face à de nouveaux défis, car des projets de développement à grande échelle – notamment la construction d’un hall de football – menacent d’effacer son caractère informel et communautaire.

Le projet aborde le jardin non pas comme un objet statique, mais comme un processus vivant – un espace défini par la pratique quotidienne. Jardiner implique des gestes continus d’attention – planter, arroser, désherber, récolter – à travers lesquels les gens façonnent et re-façonnent le paysage. Le jardin n’est donc pas seulement un espace esthétique ou écologique, mais aussi un espace social – un lieu où la mémoire, les routines quotidiennes et la présence humaine transforment sans cesse l’environnement. Le paysage, ici, n’est pas un simple décor passif que l’on contemple, mais un espace actif dans lequel on vit et agit. Comme le note l’anthropologue Barbara Bender, le paysage est toujours formé et vécu à travers la mémoire, la pratique et le pouvoir. Lucavsala reflète ces trois dimensions: ses parcelles portent la mémoire des générations précédentes, ses rythmes sont dictés par les gestes du quotidien, et son existence est intimement liée aux questions de propriété, d’accès et de contrôle politique.

Les jardins peuvent ainsi devenir des espaces à la fois de soin et de résistance – des alternatives au consumérisme et à la propriété privée, et des expressions de communauté face à la logique du développement urbain. En ce sens, Lucavsala fonctionne comme un microcosme de la société, révélant comment les valeurs, les hiérarchies et les aspirations collectives se matérialisent dans le paysage.

Jardin sur l’île explore le conflit urbain et environnemental à travers l’histoire de Lucavsala, un espace vert de Riga menacé par le développement. Le projet saisit la lutte entre l’idéal utopique d’un jardin communautaire et la réalité dystopique de la pression urbaine. Il considère le jardin comme une construction sociale vivante – un espace de mémoire, de pratique quotidienne et de négociation politique – incarnant à la fois la vulnérabilité et la résilience. Lucavsala se dresse ainsi comme un microcosme de la quête plus large d’un avenir meilleur, quoique incertain.

Garden on an island

In the very centre of Riga, there is a curious place – an idyll for the gardening craze. Lucavsala island lies between the banks of the river Daugava, literally in the middle of the city. It is made up of small garden plots, its potential not yet fully discovered. Nearly everything that happens in Lucavsala could be described as self-initiative and DIY. For decades it was home primarily to older generations, serving as both a significant source of food and, for some, a place to live. In recent years, however, it has experienced a surge of younger people – families and couples – settling here in search of a slower rhythm and connection with nature.

Lucavsala is a revelation in that sense – in search of nature one may merely cross the bridge from the city centre to enter a blooming and comparatively secluded area, a place forgotten by the city and its authorities, that has remained largely unchanged for many decades. Today, this fragile ecosystem faces new challenges, as plans for large-scale development – including the construction of a football hall – threaten to erase its informal and communal character.

The project approaches the garden not as a static object, but as a living process – a space defined by everyday practice. Gardening involves continuous acts of care – planting, watering, weeding, harvesting – through which people shape and reshape the landscape. The garden, therefore, is not only an aesthetic or ecological space, but also a social one – a site where memory, daily routines and human presence constantly remake the environment. Landscape here is not a passive backdrop we look at, but an active space we live in and act upon. As anthropologist Barbara Bender notes, landscape is always formed and experienced through memory, practice and power. Lucavsala reflects all three: its allotments carry the memory of earlier generations, its rhythms are shaped by everyday practice, and its existence is entangled with questions of ownership, access and political control.

Gardens can thus become spaces of both care and resistance – alternatives to consumerism and private property, and expressions of community against the logic of urban development. In this sense, Lucavsala functions as a microcosm of society, revealing how values, hierarchies and collective aspirations materialize in the landscape.

“Garden on the Island” explores the urban and environmental conflict through the story of Lucavsala, a green space in Riga threatened by development. The project captures thestruggle between the utopian ideal of a communal garden and the dystopian reality of urban pressure. It considers the garden as a living social construct – a space of memory, daily practice and political negotiation – embodying both vulnerability and resilience. Lucavsala stands as a microcosm of the broader search for a better, yet uncertain, future.

Cette exposition s’inscrit dans le programme du Festival Les Boréales 2025.